Voici le témoignage de Leslie Lucien, sur son allaitement:
Allaiter,
Te nourrir,
Te donner le
sein,
Ces mots
continuent de résonner en moi plusieurs années après t’avoir
sevrée.
J’avais imaginé
beaucoup de choses en choisissant de t’allaiter mais pas que je
garderai si longtemps le bonheur de la sensation de ta bouche sur mon
sein.
Comme un
prolongement de ce lien si fort qui nous unissait quand tu étais
encore dans mon ventre.
Je me souviens de
ta naissance, tes premiers instants de vie, tes yeux encore clos puis
qui s’ouvrent, immenses, un premier regard intense, profond, tes
yeux qui découvrent le monde pour la première fois, et la première
fois que tu les ouvres c’est pour les poser sur moi. Je suis ton
monde, tu deviens le mien.
Et puis
rapidement, il y a ta bouche sur mon sein.
La première
fois, ta langue sur mon mamelon, cette petite langue qui lape mon
sein semblant ne pas trop savoir quoi en faire.
Puis quelques
minutes plus tard, ce premier instant où je ressens la force de ta
succion.
Tu tètes.
Je sens mon sein
que tu aspires.
Tu sais faire mon
bébé.
Je sens les
gouttes de mon colostrum qui commencent à couler dans ta bouche.
On s’apprivoise.
Au fil des jours,
tu continues de téter et le lait commence à venir, je le vois, je
l’entends, je fais taire les petites voix dans ma tête qui me
disent « je ne peux rien quantifier » « est ce que
j’aurais assez de lait pour toi mon bébé ? »
Je me rappelle
cette montée de lait si intense, mon opulente poitrine, la tension
dans mes deux seins. Ce besoin irrépressible que tu tètes pour me
soulager comme une évidence encore une fois.
À chaque tétée,
je sens tes lèvres sur ma peau, mais aussi ton regard sur moi, tout
ton petit corps chaud, parfois lourd quand il s’abandonne après
une tétée, repue par tant de lait, par tant d’amour.
Les jours
passent, je t’observe, tes joues et tes pyjamas se remplissent,
j’apprends à me faire confiance, à te faire confiance, à nous
faire confiance.
Ne pas écouter
les mots de ceux qui me disent « elle tète trop souvent ta fille »
juste écouter mon corps et le tien, notre besoin chacune d’être
l’une contre l’autre, je te porte mais tu me portes aussi dans la
découverte de ma maternité, cette nouvelle femme que je suis en
train de devenir.
Dans notre
allaitement, il y aura de nombreux challenges, l’engorgement, mon
sein qui devient dur comme de la pierre, rougi par ce lait que ne
sort pas comme il faudrait; La fatigue, les moments de
découragements; La candidose, ces élancements permanents que rien
ne semblent soulager. Tes jours de fièvre, où je sens ta
bouche brûlante autour de mon sein frais, et pour moi la sensation
de t’offrir le meilleur dans ces moments où tu sembles si faible
mon bébé.
Sur mon chemin il
y aura ma consultante en lactation et le soutien de femmes
magnifiques dans une association de soutien à l’allaitement.
Car oui cet
allaitement c’est aussi de belles rencontres de femmes, de
sororité, des femmes qui m’ont transmis que je pouvais écouter
mon bébé, me mettre à sa hauteur.
Mes inquiétudes
de mère, ma peur de mal faire s’envolent au fil des mois.
Les mois ont
passé, nous avons traversé des moments si doux que notre
allaitement s’est installé dans le temps. Et puis
progressivement, un peu avant ta première rentrée à l’école
maternelle, j’ai senti que tu avais grandi, que j’avais envie de
retrouver mon corps rien qu’à moi, ne plus t’offrir mon lait car
tu grandissais et je sentais que nous passions à autre chose.
Ton sevrage s’est
fait en douceur et je ne me souviens plus vraiment d’une toute
dernière tétée.
Aujourd’hui, je me souviens de notre lien lacté, de ce fil tissé, un fil si fort et solide qu’il restera, j’en suis certaine, pour toute la vie.
[Auteure] : Leslie
Lucien
[Biographie] :
Transformée par l’expérience de la maternité, ainsi que par la
découverte de l’allaitement et du soutien de mère à mère au
sein d’une association de soutien à l’allaitement, elle décide
de se former en tant qu’auxiliaire de puériculture. À l’issue de
sa formation, elle choisit de travailler dans un centre de protection
maternel et infantile (PMI) parisien pour y soutenir les jeunes
parents.
En parallèle, elle accompagne aujourd’hui à Paris des futurs parents en tant que doula, accompagnante à la naissance, formée auprès de l’institut des Doulas de France.