Reprendre le travail sans suspendre l’allaitement

Ma reprise de travail approche, mon bref congé parental de 2 mois à l’issue de mon congé maternité vient de se terminer. Notre situation financière et le développement de ma carrière professionnelle m’obligent à reprendre très vite mon poste à 100 %. J’ai la chance de pouvoir prendre quelques jours de vacances pour me projeter et décider de la suite de mon allaitement.

Mon bébé a bientôt six mois ; j’ai déjà réussi à faire face à de nombreux obstacles. La reprise du travail représente pour moi une véritable source de stress : je suis envahie par de nombreuses questions et en même temps profondément motivée et convaincue que je ne dois pas abandonner l’allaitement. 

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Allaitement et attachement, un lien évident ?

Delphine Dumoulin, infirmière puéricultrice, consultante en lactation IBCLC, mais qui a également un DIU en lactation humaine et un DU en attachement, nous apporte sa vision du lien mère- bébé lors de l’allaitement.

Delphine : on évoque souvent que « l’allaitement favorise le lien mère-enfant et l’attachement du bébé ». Bien sûr, je suis d’accord avec ces propos. Cependant, dans ma pratique professionnelle de puéricultrice IBCLC DIULHAM en maternité de niveau 3, j’ai fréquemment constaté en service de maternité, en néonatalogie tout comme en consultations à distance de la naissance, que le ressenti, le vécu, et les idées reçues, pouvaient avoir un impact négatif sur l’allaitement et, à travers lui, sur le lien mère-enfant.

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Je suis bilingue en allaitement

Voici le témoignage de Claire, maman de deux enfants.

J’ai 7 ans, je viens d’emménager en Allemagne avec ma famille, et je passe un test de niveau de langue. Je dois préciser si j’ai identifié tel ou tel mot d’allemand dans l’enregistrement que je viens d’écouter. Aucune idée. Ce que j’ai entendu était une longue suite de sons indifférenciés et incompréhensibles.

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et pourquoi pas recruter une doula?

En France,depuis quelques années, on entend parler des doulas . . Ce métier, encore méconnu dans l’Hexagone, est reconnu depuis de nombreuses années en Angleterre et aux Etats-Unis. Mais qu’est ce qu’une doula? Que fait-elle ? Quel est son champ d’action ? Leslie Lucien, doula à Paris, a accepté de nous en dire plus.

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Comment j’ai vaincu une baisse de lactation

Agathe, la maman de Gabriel nous livre son témoignage.

Cela faisait 3 mois que j’allaitais mon bébé. Tout se passait à merveille ! Un à deux réveils la nuit seulement, un plaisir partagé, même avec le papa.

Et voilà que durant son 4ème mois, mon petit garçon commence à se tortiller à chaque fois que je le mets au sein, il râle, il veut sans cesse les bras. Je sentais bien qu’il y avait un problème. Ni une, ni deux, je prends un rendez-vous avec ma consultante en lactation.

Peut-être qu’il a faim votre bout de chou ?”. Ma lactation s’était tarie à tel point que Gabriel n’était pas du tout rassasié aux tétées. Ce qui avait provoqué cette baisse de production était clairement une grosse fatigue due à un stress, mais aussi le fait que je ne le mettais pas assez au sein. En effet, dès sa naissance, j’avais de véritables fontaines accrochées à ma poitrine ! A chaque pesée à la maternité, il avait pris tellement de poids que les sages femmes étaient étonnées qu’il ne soit nourri qu’au sein. ” Eh ben ! La cantine est bonne!”, m’étais-je entendu dire.

Du coup, il tétait beaucoup en quantité mais peu souvent. Or moins l’enfant est mis au sein et moins les réserves abondent…Nous l’avons pesé et sa courbe de poids était dans la zone rouge. Je me suis sentie tellement mal. Mauvaise mère qui n’avait même pas remarqué que le problème était qu’il avait faim. Désespoir total.

– Mon challenge : faire remonter sa courbe de poids en 1 semaine et reprendre confiance.


– Comment ? : Au sein toute la journée pour stimuler la lactation. Si rien ne sort, la simple succion est déjà formidable pour le processus de redémarrage ! S’il dort, utiliser le tire-lait dans le même but.


– S’il a faim, qu’il n’est pas satisfait ? : lui donner un complément de lait. Par chance, j’avais du stock au congélateur et durant cette période de “remise en forme”, j’ai toujours pu lui donner de mon lait.

Dit comme ça, ça paraît simple. Pas de quoi s’affoler ou désespérer. Mais en fait, j’ai vécu un moment terrible, bourré de doutes, de craintes, et de désespoir. Je ne voulais surtout pas arrêter de le nourrir au sein. C’était tellement important pour moi. J’en étais à un moment où je m’étais fixé 6 mois minimum d’allaitement et voulais aller au moins jusqu’à cette limite. Or mon bébé était au bord de la grève du sein, qui peut conduire au rejet total.

Ma consultante en lactation m’a énormément aidée, mais sans le soutien de mon compagnon, qui avait compris mon projet d’allaitement et qui m’encourageait, me consolait, me rassurait, je ne pense pas que j’aurais réussi. Son rôle a été crucial. C’était devenu une affaire de famille.

La semaine suivante, comme prévu, le cœur battant, je suis retournée le faire peser… il avait dépassé largement le minimum attendu ! Si j’avais écouté le médecin qui me disait que je n’avais tout simplement plus de lait, que ça arrivait, que ce n’était pas un drame, qu’il fallait penser à la santé de l’enfant avant tout et que je n’avais pas eu cette petite flamme de volonté, je serais directement passée au lait artificiel, la mort dans l’âme. D’ailleurs, le mois suivant, en voyant une courbe de poids plus que satisfaisante, il a fait les yeux ronds quand je lui ai dit que mon bébé était toujours nourri exclusivement au sein. Hi hi… petite victoire personnelle…

J’ai souvent entendu : “Oh, moi j’ai dû arrêter très vite car je n’avais pas assez de lait“.

Après cette épreuve, je peux dire à ces mamans qu’elles n’ont juste pas trouvé la bonne personne pour les guider et les soutenir dans ce moment. Car oui, la lactation ne se tarie totalement que 40 jours après la dernière tétée ou dernier tirage de lait. Certes il faut non seulement être au courant mais aussi avoir une sacré volonté et du temps à consacrer à ça. Je comprends les mamans qui pour n’importe quelle raison, et qui sera toujours valable, arrêtent l’allaitement devant ce genre de situation. Tout le monde n’en n’a pas l’envie, le courage, le temps ou les moyens. Par contre, si mon témoignage ne servait à donner un peu d’espoir et de courage qu’à une seule maman qui vivrait la même chose avec son bébé, avec les mêmes envies et possibilités d’y arriver, j’en serais ravie !

L’allaitement, source de réseau social

J’ai commencé à allaiter un certain 7 décembre, à la naissance de mon fils. Cela est venu à moi comme une évidence. Je n’avais aucune expérience en la matière. Je n’y étais pas préparée et dans mon entourage personne ne l’avait fait, surtout pas ma mère qui était de la génération où les biberons avaient sauvé les femmes au nom d’un certain féminisme.

La sage-femme qui m’avait suivie pendant ma grossesse et durant mon accouchement ne m’avait pas bien préparée à cette activité quotidienne qui m’attendait. Dès le début, sans rien savoir, je mettais simplement mon fils, au sein, quasiment toute la journée. Et c’est seule que j’ai vécu la montée de lait, trois jours après. Je me suis également débrouillée sans aide avec le tire-lait. Le modèle que l’on m’avait loué n’était pas le plus adapté pour moi mais je l’ignorais à ce moment-là. Que d’expériences déstabilisantes, de moments de solitude, de sentiments d’être novice !

Heureusement, mon entourage m’a conseillé de rentrer en relation avec la LLL (La Leche League). Ce fut une merveilleuse opportunité. Grâce à internet, j’ai pu rencontrer d’autres femmes, lire leurs témoignages, demander des conseils, les appeler, et même leur demander des services ou en rendre moi-même par ce biais… Oser aller vers des inconnues qui partageaient avec moi les joies et les inquiétudes légitimes de la maternité, quel cadeau ! Enfin, je ne me sentais plus seule. J’apprenais qu’il existe plusieurs groupes de soutien de mamans. J’avais la possibilité d’échanger par messagerie privée par internet et nous pouvions nous rencontrer physiquement de façon régulière selon les besoins de chacune. Ce principe très chaleureux m’a tout de suite plu. Et quand bien même il n’existait pas de groupe physique à côté de chez moi, j’ai pu rejoindre un groupe de mamans allaitantes.

La qualité des échanges, la disponibilité de chacune m’ont fait le plus grand bien. Quand on materne un nourrisson, on se pose une multitude de questions et pouvoir lire les messages la nuit, lors des insomnies, échanger en allaitant, savoir que l’on n’est pas seule, est vraiment précieux. Et si on a la chance de pouvoir se déplacer à des réunions et rencontrer d’autres mamans en sachant qu’on y sera reçue avec son bébé, ses autres enfants le cas échéant et son conjoint, c’est encore mieux. Que de ressources alors à ma portée ! Je me suis tout de suite sentie moins seule.
En outre, se sentir accueillie comme on est, sans jugement, avec bienveillance et être écoutée, c’est si rare. D’autres mamans avaient des vécus et des questionnements proches des miens ; je pouvais m’identifier, et être soutenue et épaulée aussi. C’est inégalable !

Ce réseau m’a permis de continuer mon allaitement, de conjurer certaines peurs. Ça m’a rendu plus forte. L’échange s’est même étendu bien au-delà de messages cordiaux. Il est devenu une source de bien-être et de confiance en moi !

J’ajoute que j’ai fait rayonner ce que mon réseau de mamans m’apportait. C’est ainsi que je me suis sentie en confiance pour allaiter au parc, au restaurant. Et cela s’est traduit par des regards émerveillés, admirateurs. Certaines femmes exprimaient même leur gratitude de pouvoir être témoin d’un tel spectacle simple et naturel d’amour et de lien.

Il se trouve aussi que nous venions tout juste d’emménager dans une nouvelle résidence. Mon allaitement a été le moyen de tisser un lien rapide et même intime avec les jeunes mères résidentes qui allaitaient elles aussi. Quel bonheur de partager ensemble nos astuces, nos lectures, en plus des habits d’enfants. De ce fait, je suis même devenue une référente auprès de mes amies, qui n’ont pas hésité ensuite à venir me demander conseil. Cela a créé une proximité incroyable.

Et ce sujet se déploie au-delà de notre sphère intime puisque je me suis sentie libre de l’évoquer auprès de praticiens soignants (ostéopathe, dentiste…). L’allaitement ne laisse certainement pas indifférent. Il peut même créer des connexions inattendues.

[Biographie] :


Juliette, maman de Tim 5,5 ans et 3,5 ans qu’elle a tous deux allaités avec bonheur et même co-allaités . Son postulat est : “Avant, j’avais des principes, maintenant je suis maman !”

« Confinement et allaitement »

#restezàlamaison .

Chacun suit à la lettre les recommandations du gouvernement, plusieurs semaines de distanciation sociale, plusieurs semaines au ralenti afin d’être vigilant pour tous. Et l’allaitement dans tout cela, comment les femmes vivent-elles leur allaitement ? Que se passent-ils pour elles ? Nous échangeons aujourd’hui avec des mamans pour qui l’allaitement avait déjà démarré avant le début du confinement.

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ÊTRE ALLAITE , UN ATOUT POUR LA VIE : POURQUOI ?

Un des rôles de Grandir Nature est de promouvoir l’allaitement maternel en apportant des informations provenant de sources scientifiques.

Nous ne voulons en aucun cas être culpabilisant mais démocratiser l’allaitement pour soutenir les mamans allaitantes .

C ‘est ainsi que nous avons crée l’affiche « être allaité : un atout pour la vie. » .

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La prise d’aspirine modérée pendant un allaitement pose-t-elle un problème ?

Pascale Baugé nous aide à comprendre les mécanismes de diffusion de ce traitement dans le lait maternel.

Les mamans allaitantes se posent toujours, à juste titre, beaucoup de questions lorsqu’elles sont obligées de prendre des médicaments : elles s’inquiètent des conséquences potentielles de l’absorption via le lait maternel des molécules actives du médicament sur leur bébé.
Le risque dépend de plusieurs facteurs : de la biodisponibilité du traitement (s’il passe vite dans le sang, et en quelle quantité), de la concentration dans le plasma maternel, et de la capacité de passage de la molécule dans le lait maternel.

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QUAND TOUT NE SE PASSE PAS COMME ON LE PENSAIT

Voici le témoignage de Laurette, maman de deux garçons.

Je n’ai jamais fait partie de ces filles qui, très tôt, envisagent la maternité comme une évidence, qui savent avec évidence qu’elles veulent des enfants. Pourtant lorsque j’ai rencontré mon ami, ça a été une évidence ; pour lui comme pour moi.

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Notre allaitement, si doux et si puissant

Voici le témoignage de Leslie Lucien, sur son allaitement:

Allaiter,

Te nourrir,

Te donner le sein,

Ces mots continuent de résonner en moi plusieurs années après t’avoir sevrée.

J’avais imaginé beaucoup de choses en choisissant de t’allaiter mais pas que je garderai si longtemps le bonheur de la sensation de ta bouche sur mon sein.

Comme un prolongement de ce lien si fort qui nous unissait quand tu étais encore dans mon ventre.

Je me souviens de ta naissance, tes premiers instants de vie, tes yeux encore clos puis qui s’ouvrent, immenses, un premier regard intense, profond, tes yeux qui découvrent le monde pour la première fois, et la première fois que tu les ouvres c’est pour les poser sur moi. Je suis ton monde, tu deviens le mien.

Et puis rapidement, il y a ta bouche sur mon sein.

La première fois, ta langue sur mon mamelon, cette petite langue qui lape mon sein semblant ne pas trop savoir quoi en faire.

Puis quelques minutes plus tard, ce premier instant où je ressens la force de ta succion. 

Tu tètes.

Je sens mon sein que tu aspires.

Tu sais faire mon bébé.

Je sens les gouttes de mon colostrum qui commencent à couler dans ta bouche.

On s’apprivoise.

Au fil des jours, tu continues de téter et le lait commence à venir, je le vois, je l’entends, je fais taire les petites voix dans ma tête qui me disent « je ne peux rien quantifier » « est ce que j’aurais assez de lait pour toi mon bébé ? »

Je me rappelle cette montée de lait si intense, mon opulente poitrine, la tension dans mes deux seins. Ce besoin irrépressible que tu tètes pour me soulager comme une évidence encore une fois.

À chaque tétée, je sens tes lèvres sur ma peau, mais aussi ton regard sur moi, tout ton petit corps chaud, parfois lourd quand il s’abandonne après une tétée, repue par tant de lait, par tant d’amour. 

Les jours passent, je t’observe, tes joues et tes pyjamas se remplissent, j’apprends à me faire confiance, à te faire confiance, à nous faire confiance. 

Ne pas écouter les mots de ceux qui me disent « elle tète trop souvent ta fille » juste écouter mon corps et le tien, notre besoin chacune d’être l’une contre l’autre, je te porte mais tu me portes aussi dans la découverte de ma maternité, cette nouvelle femme que je suis en train de devenir.

Dans notre allaitement, il y aura de nombreux challenges, l’engorgement, mon sein qui devient dur comme de la pierre, rougi par ce lait que ne sort pas comme il faudrait; La fatigue, les moments de découragements; La candidose, ces élancements permanents que rien ne semblent soulager. Tes jours de fièvre, où je sens ta bouche brûlante autour de mon sein frais, et pour moi la sensation de t’offrir le meilleur dans ces moments où tu sembles si faible mon bébé. 

Sur mon chemin il y aura ma consultante en lactation et le soutien de femmes magnifiques dans une association de soutien à l’allaitement.

Car oui cet allaitement c’est aussi de belles rencontres de femmes, de sororité, des femmes qui m’ont transmis que je pouvais écouter mon bébé, me mettre à sa hauteur.

Mes inquiétudes de mère, ma peur de mal faire s’envolent au fil des mois.

Les mois ont passé, nous avons traversé des moments si doux que notre allaitement s’est installé dans le temps. Et puis progressivement, un peu avant ta première rentrée à l’école maternelle, j’ai senti que tu avais grandi, que j’avais envie de retrouver mon corps rien qu’à moi, ne plus t’offrir mon lait car tu grandissais et je sentais que nous passions à autre chose.

Ton sevrage s’est fait en douceur et je ne me souviens plus vraiment d’une toute dernière tétée.

Aujourd’hui, je me souviens de notre lien lacté, de ce fil tissé, un fil si fort et solide qu’il restera, j’en suis certaine, pour toute la vie. 

[Auteure] : Leslie Lucien

[Biographie] : Transformée par l’expérience de la maternité, ainsi que par la découverte de l’allaitement et du soutien de mère à mère au sein d’une association de soutien à l’allaitement, elle décide de se former en tant qu’auxiliaire de puériculture. À l’issue de sa formation, elle choisit de travailler dans un centre de protection maternel et infantile (PMI) parisien pour y soutenir les jeunes parents.

En parallèle, elle accompagne aujourd’hui à Paris des futurs parents en tant que doula, accompagnante à la naissance, formée auprès de l’institut des Doulas de France.  

Allaitement et DME : la suite logique ?

Christine Zalejski, docteur en biologie, experte en alimentation infantile nous parle de la diversification menée par l’enfant.

Votre bébé grandit et ses besoins aussi. L’éveiller à de nouvelles saveurs, de nouvelles textures en bouche se fait de plus en plus sentir. Il a soif de mastication et de coordination main-bouche. La diversification alimentaire n’est pas loin… Période d’appréhension, de doutes, de questionnements la diversification alimentaire n’a pas fini de faire parler les familles. Et si la diversification alimentaire pouvait être plus facile, plus simple, plus intuitive à l’écoute de bébé Homme, comme le font si bien toutes les autres mamans mammifères de la planète ? Un nouveau mode de diversification du bébé se développe permettant une alimentation en toute bienveillance en adéquation avec de nombreuses valeurs de l’allaitement : la DME acronyme de diversification menée par l’enfant qui attire de plus en plus de parents chaque année. Qu’est-ce que c’est exactement ? Et en quoi semble-t-elle plus simple à mettre en place en continuité de l’allaitement ?

La diversification menée par l’enfant est donc un mode de diversification alimentaire qui permet progressivement à l’enfant de découvrir les autres familles d’aliments en plus du lait. Vers les 6 mois de votre bébé, et rarement avant, des aliments entiers cuits ou crus sont proposés et c’est en toute autonomie que votre bébé va se nourrir. C’est en général à 6 mois que votre bébé va pouvoir rester assis seul plus longtemps, va pouvoir agripper des objets et les porter à sa bouche en faisant des mouvements de mastication et faire des mouvements de tête. Toutes ces aptitudes sont notamment nécessaires au début de la DME. Vous allez lui proposer dans un premier temps des légumes puis des fruits et enfin toutes les familles d’aliments avec des tailles, des formes et des textures adaptées permettant à votre bébé de s’éveiller aux goûts et aux textures, d’explorer les aliments avec tous ses sens en éveil. Les aliments entiers moins transformés, sont plus faciles à prendre en main, les purées et compotes seront proposées beaucoup plus tard lorsque votre bébé s’essaiera au maniement de la petite cuillère. Le lait reste au début sa nourriture de base dans tous les cas. Seul, il va porter les aliments à sa bouche développant sa motricité, sa dextérité, sa coordination œil-main-bouche et ses mouvements masticatoires. C’est en expérimentant qu’on apprend ! Ses découvertes seront d’autant plus faciles en bouche lorsqu’elles sont menées tôt car votre bébé possède un réflexe naturel et très actif à cet âge où la langue notamment est une véritable barrière pour les aliments qui seraient de taille inadaptée ou trop secs pour être déglutis. Alors n’ayez aucune crainte qu’il s’étouffe, il n’y a pas plus de risque qu’en diversification alimentaire classique, soyez simplement bienveillant et attentif. Votre bébé, grâce à la DME, va devenir un vrai expert autonome de son alimentation et vous verrez comme il apprend très vite.

La DME s’inscrit ainsi dans la continuité de l’allaitement sur de nombreux points. En effet elle permet en toute bienveillance de respecter la satiété de votre bébé qui s’alimente seul. Les morceaux d’aliments sont devant lui et il porte à sa bouche ce qu’il souhaite. Il écoute son corps et sa faim, portant à sa bouche les légumes, les fruits en fonction de ses besoins. Comme pour l’allaitement votre bébé est autonome, il s’alimente seul en fonction du développement de sa coordination œil-main-bouche. Il n’y a pas d’intermédiaire encore sa bouche et sa nourriture. C’est justement le principe de la DME de ne pas intervenir et de ne jamais porter un aliment à la bouche de son bébé mais de lui laisser seul faire le geste du porter à la bouche. Tout au long de l’allaitement, les muscles de la mâchoire sont sollicités pour téter le sein. En proposant à votre bébé des aliments entiers plus ou moins cuits vous allez pouvoir continuer à activer les muscles de la mâchoire. Petit à petit ce sont d’autres muscles qui vont être utilisés pour que la mâchoire soit dans une position adéquate non plus pour déglutir un liquide mais pour mastiquer, mâcher puis croquer des aliments solides. Le fait de mâcher des aliments assez précocement favoriserait l’implantation dentaire ; donc n’hésitez-pas ! Enfin alors qu’avec le lait vous fournissiez une nourriture adaptée à votre bébé, c’est dans cette même dynamique que vous allez avec la DME proposer des aliments adaptés en terme de sécurité alimentaire, c’est-à-dire de texture, taille ou forme adapté ainsi que d’hygiène alimentaire avec des aliments sains, le moins transformés possible, le plus nutritifs et naturels.

La DME permet donc une continuité tant sur le plan physique que psychologique comme avec l’allaitement où le bébé est acteur de son alimentation. Il gère lui-même sa satiété, sa faim et est à l’écoute de son corps. Vous, parents êtes les chefs d’orchestre de tout cela en proposant des aliments sains, naturels et adaptés aux aptitudes de votre bébé. Votre bébé va pouvoir très vite développer ses capacités psychomotrices par l’expérience et la curiosité. Ainsi, il pourra plus rapidement partager la table et le repas familial, faisant de lui un enfant heureux et fier de l’alimenter seul comme papa-maman.

[Biographie] : Christine Zalejski est docteur en biologie, experte en alimentation infantile depuis 2010. Fondatrice du site Cubes et Petits pois, elle partage des informations sur la diversification alimentaire classique, la DME et des recettes et menus adaptés. Auteure et conférencière elle a notamment écrit le premier livre dédié à la DME en France. Elle consulte sur Paris et dans l’Ouest parisien et forme les professionnels de la petite enfance souhaitant accompagner au mieux les bébés dans leur alimentation quotidienne.

Réussir son allaitement après une césarienne, c’est possible !

Voici le témoignage de Hope N., maman d’une petite fille.

Quand je suis tombée enceinte, j’étais sûre que je voulais accoucher à la maison de façon naturelle et que je voulais allaiter mon enfant. Je suis l’ainée de quatre enfants et j’ai pu être présente à l’accouchement à domicile de ma plus jeune sœur quand j’avais huit ans – une expérience qui m’a beaucoup marquée. J’avais tout préparé dans ce sens mais comme dit le dicton juif « l’Homme planifie, Dieu rit ». Suite à une pré-éclampsie*, j’ai accouché par césarienne en urgence à 38 semaines et même si je savais que j’avais tout fait pour préserver la santé de mon bébé et de moi-même, je me sentais profondément en échec. Pendant toute la grossesse, on m’avait dit « Fait confiance à ton corps. Ton corps saura quoi faire. » Mais mon corps n’avait pas assuré. Sans la médecine moderne, je n’aurais probablement pas survécu à l’accouchement !

Du coup, je ne faisais plus confiance à mon corps pour faire du lait pour mon enfant non plus. J’étais convaincue de ne pas être capable et le discours d’autres personnes ne m’a pas beaucoup aidé. Plusieurs infirmières à l’hôpital m’ont dit qu’à cause de la césarienne, le lait ne viendrait pas tout de suite, qu’il faudrait certainement compléter avec de la formule**. De l’autre côté, je lisais que plus je complétais avec la formule, moins je produirais. Puis on me disait que le stress réduisait la production aussi et j’étais dans une des situations le plus stressantes de toute ma vie ! Le pédiatre de l’hôpital m’a fortement déconseillé l’allaitement « le sein est traitre, madame, on ne peut pas mesurer combien boit l’enfant ! » Et pour couronner le tout, l’allaitement me faisait mal. J’avais des crevasses et c’était « pas normal ». C’était sûr. Je n’allais pas y arriver.

L’obstétricien qui a fait la césarienne est venu vérifier la cicatrice et m’a trouvé en larmes. Quand je lui ai dit que j’avais peur de ne pas pouvoir allaiter car le lait ne viendrait pas, il m’a gentiment pris la main et il m’a dit « ne le prenez pas mal, mais vous n’êtes pas si exceptionnelle ! Le lait viendra, comme pour tout le monde. » Ma sage-femme m’a rassuré aussi. Elle a donné des instructions aux infirmières pour qu’elles n’insistent pas pour donner des biberons et nous avons mis en place un plan car ma petite perdait du poids et il fallait la nourrir.

J’ai fait beaucoup de peau à peau. Je ne pouvais pas encore me déplacer à cause de l’opération, mais je pouvais avoir mon bébé dans mes bras et je la gardais le plus possible contre moi. La sage-femme m’a montré comment exprimer mon lait avec mes mains et m’a aidé à louer un tire-lait aussi. Après chaque tétée, je tirais ce qui restait et je le donnais à ma fille avec une pipette, puis si elle mangeait tout je lui proposais un peu de lait industriel (toujours à la pipette) pour rassurer les infirmières sur son poids. Après une journée comme ça, ma fille a bien pris du poids et a refusé la formule car elle était bien rassasiée.

Deux semaines après, j’ai vu une consultante en lactation qui m’a beaucoup aidé à avoir confiance et m’a conseillé de voir une ostéopathe car ma fille avait la mâchoire serrée quand elle tétait. Effectivement, cela a soulagé la douleur. En vrai, je n’avais pas du tout de problème de production de lait mais j’ai mis du temps à y croire ! Je n’avais pas particulièrement prévu d’allaiter longtemps mais c’était de plus en plus agréable ; et puis j’étais moins angoissée et cela ne faisait plus mal. J’ai trouvé le réseau de La Leche League et j’allais à des réunions avec d’autres mamans qui allaitaient et qui donnaient toujours de bons conseils, du soutien et de l’empathie. Mon bébé était toute ronde et heureuse – et je me sentais bien aussi ! Nous avons pas mal voyagé quand ma fille était bébé, allant même jusqu’en Australie quand elle avait 6 mois, et avec l’allaitement, c’était tellement simple. Je me souviendrai toujours du regard horrifié de l’agent de sécurité à l’aéroport quand il m’a dit « Allez-y sortez tous les biberons, les compotes, etc. » et je lui ai dit, « Non, j’ai rien », « Rien ?? » « Enfin j’ai tout ce qu’il faut ici », en désignant mes seins. Le pauvre a eu du mal à s’en remettre.

Notre aventure d’allaitement s’est terminée quand ma fille a eu 2,5 ans. 8 mois plus tard, je produis toujours quelques gouttes de lait. Pas trop mal pour un corps qui ne savait pas comment faire !

* La pré-éclampsie est une maladie caractérisée par l’association d’une hypertension artérielle accompagnée d’une apparition exagérée de protéines dans les urines et d’oedèmes.

** NDLR : ce qu’Hope nomme « formule » correspond à ce que l’on entend par les substituts du lait maternel, « formula » en anglais, autrement dit les laits de préparation pour nourrissons.

Allaitement, ocytocine et accouchement

[Auteure] : Marie-Laure Lannette, accompagnante périnatale et auxiliaire de puériculture, Marie-Laure propose divers ateliers et services pour accompagner les parents dans la parentalité, et favoriser le lien parent-bébé, dont notamment l’approche Biological Nurturing®.

Lors de ma formation d’auxiliaire de puériculture j’ai fait un stage en maternité. Je me souviens que lors de l’évaluation de fin de stage, on m’avait reproché de ne pas avoir fait assez de “mise au sein“: cette technique qui consiste à plaquer la tête du bébé sur la poitrine de sa mère, voire à saisir le sein de celle-ci pour l’enfourner dans la bouche du bébé. Cette technique m’a toujours mise extrêmement mal à l’aise.

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La maladie est un passage

Voici le témoignage d’Hortense, maman de Charlotte et Edouard, et de Juliette.

Une petite boule qui roule sous le sein, et le verdit qui tombe ; c’est un cancer. Et comme par hasard toutes les copines, elles, font un bébé au même moment. Alors on pleure beaucoup et on se soigne. Sérieusement.

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Rester déterminée

Voici le témoignage de Julie, 41 ans, maman de Ruben 3 ans et Zelig 7 mois.

Quand j’ai dit à ma mère que je pensais allaiter mon bébé, elle a émis quelques réserves : « tu es comme moi, tu sais. Tu as les bouts de seins trop courts. », a-t-elle rétorqué alors. Ni ma sœur ni moi n’avions été allaitées pour ces mêmes raisons. De plus, je suis née à une époque où on n’encourageait pas vraiment les femmes à l’allaitement maternel, elles qui venaient de brûler leurs soutien-gorge et prônaient la liberté sexuelle. Mais j’étais motivée et je me suis inscrite à une séance de formation avec une sage-femme qui donnait des conseils pratiques, montrait les positions. C’est avec elle aussi que nous avons fait de l’haptonomie.

Je voulais essayer d’allaiter car je trouvais ça simple, naturel, et naturellement bon pour mon bébé, mais aussi très pratique pour moi dans tous les déplacements (pas d’eau à transporter, de biberon à chauffer, de timing à calculer) et puis j’avais envie de ces moments de câlins avec mon bébé.

À la naissance de Ruben, on m’a demandé si je voulais allaiter et à la première mise au sein j’ai pu compter sur l’aide d’une puéricultrice très douce et pédagogue qui m’a aidée à bien placer mon bébé. Je me suis sentie bien accompagnée par le personnel de la maternité .

De retour à la maison, ça a été une autre histoire. Ruben se montrait très impatient. Il l’est toujours d’ailleurs en ce qui concerne la nourriture ! Si je ne trouvais pas tout de suite la bonne position, il s’énervait et finissait par s’endormir. Puis il se réveillait, réclamait et c’était reparti ! Ça a pris un peu de temps pour qu’on s’accorde lui et moi. J’ai même essayé les bouts de seins en silicone (influencée par la réflexion de ma mère), mais c’était pire.

Au 2ème ou 3ème jour, j’ai reçu la visite d’une sage-femme qui m’a bien aidée à faire retomber le stress. Mon conjoint a également été un allié sur qui je pouvais compter car il avait pu observer la position qui convenait à Ruben et il m’aidait à bien le placer. Une fois ce petit calage passé, ça a roulé ! Au bout de deux mois, je suis passée à un allaitement mixte pour préparer en douceur ma reprise du travail.

Au 5ème mois, j’ai été prise de vertiges très violents. Après de nombreuses analyses, on m’a diagnostiqué un virus dans l’oreille interne et j’ai dû prendre des antibiotiques très forts, incompatibles avec l’allaitement. J’ai donc arrêté subitement d’allaiter Ruben et j’ai été un peu triste de ce sevrage non choisi. Mais comme Ruben l’a bien vécu, j’ai pu me concentrer sur le traitement de ces affreux vertiges.

Mon deuxième fils, Zelig, est né avec un mois d’avance. C’était tout de même un beau bébé de 3,130 kg. Forte de ma première expérience, je suis retournée dans la même maternité … et heureusement. Soucieuse d’offrir la même chose à chacun de mes enfants, je comptais bien sûr allaiter Zelig.

À la première mise au sein, on m’a proposé de l’assistance. Je pensais m’en sortir facilement puisque c’était mon deuxième enfant. Pourtant un autre bébé voulait dire une autre histoire.

À peine s’était-il accroché au sein que Zelig a eu beaucoup de mal à téter. Il était comme essoufflé, il respirait difficilement. La puéricultrice qui était restée dans la salle d’accouchement a immédiatement compris que Zelig peinait à respirer normalement et elle l’a emmené en salle de soins pour aspirer les sécrétions qui entravaient sa trachée.

Et les minutes passaient…
Quand j’ai vu revenir mon conjoint avec le pédiatre mais sans mon bébé, j’ai compris que quelque chose n’allait pas. Zelig avait été emmené en salle de soins intensifs et placé sous assistance respiratoire (avec un masque sur le nez et la bouche pour l’aider à respirer). Il avait un pneumo thorax, c’est-à-dire une poche d’air dans le poumon qui l’empêche de se gonfler entièrement et qui nécessite une ponction. J’étais abasourdie mais mon conjoint était là heureusement pour me rassurer et me donner des nouvelles de Zelig qui était sous perfusion et sonde gastique.

Notre première tétée avait donc été très brève. Le personnel soignant a déconseillé les mises au sein, les jugeant trop fatigantes pour lui et impossibles avec l’harnachement du monitoring. La sage-femme m’a donc proposé un tire-lait pour stimuler ma lactation. Elle m’a constamment encouragée à continuer même si je ne collectais qu’une goutte de colostrum.

Quelques heures plus tard, j’ai pu aller voir Zelig en unité de soins intensifs et faire une séance de peau à peau avec lui (malgré les branchements et le masque). J’étais heureuse de ce moment partagé et je pense que ça a stimulé ma lactation.

Une fois la ponction de la bulle d’air faite, Zelig respirait mieux mais il a dû rester en réanimation. J’allais le voir et j’utilisais le tire-lait mis à ma disposition dans la salle. Tout était pensé pour favoriser l’allaitement maternel.

Quand ma montée de lait est arrivée, mon lait a été testé pour vérifier qu’il n’y avait aucun germe et Zelig a pu en recevoir quelques gouttes sur une gaze posée sur ses lèvres, puis via la sonde gastrique. On lui a retiré la sonde le 6ème jour grâce à la puéricultrice qui a réussi à convaincre le pédiatre et j’ai pu enfin allaiter Zelig naturellement, comme je l’avais fait pour son grand frère. Ce fut ma plus belle victoire !

Pendant ces 6 jours de stress, d’inquiétude, d’attente, je suis toujours restée motivée. Je mettais toute mon énergie à tirer mon lait assidûment. Je me disais que je devais y arriver pour lui. Avec du recul, je me dis que c’était peut-être aussi ma façon de me masquer la gravité de la situation. Lui donner mon lait, c’était la seule aide que je pouvais lui apporter. De retour à la maison, tout s’est bien passé. J’ai pu allaiter Zelig 6 mois.

Cette expérience m’a appris que quand je veux vraiment quelque chose, je suis capable d’aller au bout, je suis déterminée. Je ne retiens pas les difficultés ni la souffrance, je sais que je devais juste le faire.

Reprise du travail et émotions

C’est l’heure de la rentrée pour les enfants mais de nombreuses mamans reprennent le travail également. Leslie Lucien nous partage le vécu d’une maman qu ‘ elle a accompagné

La reprise du travail après la naissance d’un enfant peut être une évidence pour certaines femmes, mais parfois elle ne l’est pas. Pas toujours simple en effet pour une femme, nouvellement maman, de laisser son bébé en garde, de trouver un nouveau rythme quand elle a passé plusieurs semaines ou plusieurs mois dans le cocon douillet de sa relation avec son bébé.

Ce témoignage est le récit d’une expérience vécue à la PMI où je travaille en tant qu’auxiliaire de puériculture. Je comprends encore une fois à travers la mission qui m’est confiée combien être accompagnée est nécessaire et à quel point l’expression de nos émotions et l’écoute sont précieuses pour avancer sur le chemin de parents.

Sophie* est entrée dans la PMI, elle avait les yeux humides, elle était seule, sans son bébé. Elle m’a regardée et m’a demandé avec une petite voix douce : « Est-ce que je peux quand même participer à l’accueil parents-bébé** même si ma fille est à la crèche ? »

Bien sûr elle était la bienvenue. Bien sûr nous lui avons proposé de s’asseoir avec nous sur les grands tapis colorés où gigotaient déjà deux bébés sous la surveillance de leurs mamans. Nous nous sommes regardées toutes les deux, j’ai senti l’émotion et les larmes monter un peu plus dans ses yeux prêts à déborder, sa voix hésitante. Je lui ai proposé de prendre un peu de temps juste elle et moi, toutes les deux. Elle m’a donc suivie, tandis que ma collègue prenait le relais auprès des autres mamans.

Nous nous sommes installées dans notre salle d’allaitement, petite pièce lumineuse, deux grands fauteuils confortables, des belles affiches de bébés ou de bambins plus grands allaités, de l’eau à disposition et des lectures autour des premiers mois de vie de bébé….

Tandis que je lui tendais un mouchoir, Sophie s’est assise et s’est mise à sangloter plus franchement. Nous sommes restées quelques secondes dans le silence de ses larmes, elle débordée d’émotions, moi prête à accueillir ses mots. Et puis, elle a pris une grande respiration et tout est sorti en une phrase. Elle m’a expliqué le vide qu’elle ressentait en n’étant plus 24 heures sur 24 avec son bébé, la tristesse dans les yeux de son bébé au moment où elle le laisse à la crèche, les professionnels de la crèche pour qui tout semble « normal », les échanges pas toujours simples avec le papa, le doute à l’idée de reprendre le chemin du travail dans quelques semaines seulement, la crainte que son lait se tarisse, les questions logistiques sur la conservation du lait, quand le tirer, comment, avec quel tire-lait, manuel, électrique ou encore à la main ?

Elle a fini de déposer ses émotions, de poser ses questions, toutes ces choses qui prenaient tant de place dans son cœur de maman et dans son esprit de femme. Les larmes ont continué de couler sur ses joues, je l’ai invitée à accueillir sa peine, à la vivre plutôt que la refouler, à ne pas faire comme si elle n’existait pas. Elle m’a dit à ce moment-là qu’elle s’autorisait rarement à pleurer, qu’elle se sentait coupable car elle avait peur que sa fille ne ressente sa peine ; comme si ne pas en parler pouvait faire disparaître sa tristesse, comme si l’enfouir pouvait tout arranger. « On dit souvent que les bébés sont des éponges alors est ce que mon bébé éponge mon inquiétude ? » s’est-elle autorisée enfin à me dire au bout d’un moment. Un condensé d’amour et de culpabilité maternels. 

Bien sûr, je l’ai invitée à parler à son bébé, à dire, à pleurer, à ne pas masquer. J’ai écouté, j’ai accueilli toutes ses émotions et puis je l’ai informée aussi au sujet de l’allaitement, des rythmes du bébé, de cette adaptation en crèche qui nécessite bien plus de temps que les quelques jours que l’on se donne la plupart du temps. J’ai ouvert la porte aussi à l’éventualité de repousser la reprise, de parler aussi à l’équipe de la crèche, à son compagnon… Et puis j’ai surtout laissé les points de suspension. Jamais je ne donne de réponse toute faite, je donne des pistes de réflexion, car j’ai davantage envie de laisser l’espace pour que les femmes, les couples, trouvent eux-mêmes leurs propres réponses.

Les jours ont passé, la maman est revenue vers moi pour me dire que l’adaptation se faisait très progressivement à la crèche. Elle a trouvé des solutions par elle-même. Elle a pu parler à l’équipe de professionnels de la crèche qui a été très à l’écoute, ce qui l’a beaucoup rassurée. Elle a aussi parlé au papa qui a été un soutien primordial pour elle. Et surtout elle m’a dit avec douceur : « j’ai décidé de prendre les choses comme elles viennent et d’arrêter de vouloir tout anticiper » … peut être sa clé à elle vers une reprise du travail en confiance ?

Dans certains centres de Protection Maternelle et Infantile, l’équipe est composée d’une infirmière puéricultrice, d’auxiliaires de puériculture, d’une psychologue et de médecins. Nous pouvons accueillir les familles en post-natal notamment pour du soutien, de l’accompagnement autour de l’allaitement, du maternage. Nous offrons des moments d’écoute après la naissance du bébé et pour leurs premières semaines / premiers mois de vie ensemble.

* pour le besoin du récit, le prénom a été modifié
** Accueil parents-bébé : Espace d’écoute, de soutien et de partage destiné aux  parents et à leurs enfants de la naissance à la marche, animé par une professionnel de la structure.

[Biographie] : auxiliaire de puériculture. Elle travaille dans un centre de protection maternel et infantile (PMI) parisien pour y soutenir les jeunes parents. En parallèle, elle accompagne des futurs parents en tant que doula, accompagnante à la naissance, formée auprès de l’institut des Doulas de France.

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