Témoignage de Florie, sage-femme libérale, maman de 2 enfants. Elle tient à accompagner les jeunes mamans , libérer la parole sur les difficultés et la pression que les mamans doivent supporter.
Dès le début de ma première grossesse, j’ai su que je voulais que mon bébé soit allaité. La première tétée a été magique, encore au coeur de l’émotion de l’accouchement, de cette découverte incroyable du visage de son bébé, de sentir son petit corps sur mon ventre et non plus dedans. Et la jolie surprise de découvrir que l’on venait d’accueillir notre première petite fille. La tétée de bienvenue s’est très bien passée, la miss a tétée dès le début comme une chef. J’ai la chance d’avoir eu deux allaitements qui ont démarré sans difficulté. Dès les premiers jours j’ai pu profiter de mon bébé collé à moi et lui offrir les tétées à volonté sans appréhension. Sans me fixer d’objectif ou de limites, je me disais que ce serait difficile pour moi si l’allaitement devrait s’arrêter avant 6 mois. Cette période est passée à tout vitesse et nous voilà à fêter le demi anniversaire de la princesse. La question du sevrage ne s’est pas posée. Tout se déroule si naturellement que je me suis mise à rêver d’un allaitement de 9 mois, puis pourquoi pas un an ?
Voir son bébé grandir au sein est une expérience extraordinaire, nous grandissons ensemble, moi en tant que maman, elle en tant que petit être. Les premières tétées sont une découverte, de nouvelles, sensations, de nouvelles responsabilités, des nouvelles craintes et angoisses également. Je revois ce petit bébé tentant d’attraper un mamelon trop grand pour elle, les premières photos sur lesquelles sa tête est plus petite que le sein en pleine expansion. Puis nous prenons nos marques, ces petits gestes réfléchis et hésitants laissent peu à peu place à une routine et une complicité entre nous deux. Les positions d’allaitement si importantes pour le démarrage deviennent plus acrobatiques au fil des mois. L’allaitement “à la demande” aux premières semaines nécessite que l’on devine quand bébé a faim, ou réclame un peu de réconfort. L’allaitement à la demande avec un bébé qui sait s’exprimer, se déplacer, nécessite d’être disponible quand bébé vient réclamer ses “tétée tétée“.
Je n’ai jamais été confrontée aux remarques de proches ou d’inconnus sur mon allaitement. Pourtant j’ai eu l’impression de l’allaitement “long” n’était pas justifié. Je n’ai jamais été à l’aise à l’idée de devoir allaiter en public. Je prône la liberté d’allaiter ou on veut et quand on veut, je suis attendrie lorsque je croise un bébé qui tète mais j’ai toujours eu la crainte de devoir faire face à des remarques désobligeantes. Plus mes enfants grandissaient plus je “cachais” mon allaitement, je me faisais discrète pour ne pas attiser des discussions.
J’ai été très fière et rassurée de pouvoir apaiser mon enfant en la mettant au sein. Ce réconfort est tellement efficace et évident lors de petits ou gros bobos, de petits ou gros chagrins, de stress, de peurs ou désamorcer une situation de tempête émotionnelle compliquée.
A ses un an, j’ai eu une remise en question. Ne sachant pas s’il était normal ou acceptable qu’elle soit toujours au sein. Au fond de moi il m’était impossible de me résoudre à la priver de ces moments qu’elle réclamait tant et qu’elle semblait bien apprécier. Je m’étais préparée au fait qu’elle arrêterait un jour, mais jamais au fait que je devrais la sevrer. Alors on a continué, les tétées sont devenues plus rares à certains moments mais malgré tout quotidiennes.
Quand elle a eu 15 mois nous avons décidé d’agrandir la famille. La question s’est vite posée de savoir si je continuerais l’allaitement pendant la grossesse, il m’était très difficile d’envisager le co allaitement mais encore plus de lui imposer le sevrage.
A ma grande surprise, elle a tétée moins souvent une journée, puis plus du tout le lendemain, pour ses 16 mois. Ce fût pour moi un soulagement car depuis quelques jours les tétées étaient devenues douloureuses, j’appréhendais ce moment. La semaine suivante je découvrais que son petit frère s’était déjà installé.
L’allaitement de ce 2ème bébé était une évidence. Je savais dès le début que cet allaitement serait un allaitement dit long. J’espérais lui offrir au moins autant que sa soeur. Nous avons donc tout mis en place pour surmonter les quelques difficultés que nous avons rencontrées : candidose à 6 mois, confusion biberon/sein à 10 mois… et les mois sont passés naturellement. Le cap des 16 mois est arrivé et bébé ne se décidait pas à arrêter. Je lui laissais jusqu’à ses 18 mois pour arrêter les tétées. Bien que je fusse toujours décidée à lui laisser choisir le moment de son sevrage, beaucoup de questions se bousculaient, j’appréhendais qu’on m’en parle et que l’on porte un jugement. Je me suis posée des limites, 20 mois puis 24 … Sans jamais parvenir à mettre en place un sevrage efficace. Finalement il prendra sa dernière tétée à un peu plus de 27 mois.
Je suis extrêmement fière de ce parcours. Je souhaitais partager cette expérience extraordinaire d’une part pour démocratiser non seulement l’allaitement mais aussi l’allaitement long et d’autre part pour transmettre le message aux mamans de toujours écouter leur instinct le plus profond.
Il faut savoir lâcher prise, se faire confiance et faire confiance à son bébé. Vous savez que vous lui apportez le meilleur. Si l’arrêt de l’allaitement vous semble prématuré c’est certainement qu’il l’est. Si vous vivez mal le sevrage de votre bébé, que vous ressentait une grande frustration, de la tristesse c’est que le temps n’est pas encore venu. Les tentations d’induire un sevrage sont revenues à plusieurs reprises. Mais chaque fois mon enfant me montrait à quel point c’était important pour lui de continuer.
Le sevrage naturel du petit humain est estimé entre 2 ans et demi et 7 ans. Chaque enfant chaque maman doit respecter son rythme et ses limites. Je vous encourage à vivre pleinement votre allaitement. Sachez vous entourer de personnes bienveillantes et compétentes pour vous accompagner dans les difficultés que vous rencontrerez tout en respectant vos choix et vos désirs.